– Délégué général de la Communauté française aux droits de l’enfant –
À moins de trois semaines de la journée internationale de lutte contre la pauvreté (le 17 octobre), le Délégué général aux droits de l’enfant estime essentiel de rappeler quelques principes fondamentaux en lien avec cette thématique :
La gratuité scolaire n’est ni une faveur ni une aide sociale, elle fait partie du droit à l’éducation garanti par notre Constitution et par la Convention Internationale relative aux Droits de l’Enfant (CIDE) qui stipule dans son article 28 que « Les États parties reconnaissent le droit de l’enfant à l’éducation, et en particulier, en vue d’assurer l’exercice de ce droit progressivement et sur la base de l’égalité des chances :
- a) ils rendent l’enseignement primaire obligatoire et gratuit pour tous ;
- b) ils encouragent l’organisation de différentes formes d’enseignement secondaire, tant général que professionnel, les rendent ouvertes et accessibles à tout enfant, et prennent des mesures appropriées, telles que l’instauration de la gratuité de l’enseignement et l’offre d’une aide financière en cas de besoin. »
Cette interprétation est d’ailleurs confirmée par l’avis n° 65.071/2 du Conseil d’Etat qui rappelle très justement que l’article 28 de la CIDE a un effet direct en droit belge. La Ligue des familles, dans sa dernière étude, a démontré à quel point le coût lié aux frais scolaires mettait en grande difficulté de nombreuses familles. De plus, si nous analysons cette situation sous le prisme strictement économique, il est important de rappeler que l’UNICEF, en 2012, démontrait qu’aucun investissement n’est plus « rentable » que celui que l’on peut faire auprès des enfants. Les chercheurs parlent d’un rapport de rentabilité de 7 voire 15 pour 1 : chaque euro investi dans l’enseignement rapporterait de 10 à 15 euros en termes de croissance économique
Une étude de la Fondation Roi Baudouin, datant d’octobre 2023, sur la déprivation des enfants, réalisée par Anne Catherine Guio, confirme cette analyse. La chercheuse souligne à quel point « il est important de rappeler qu’investir dans l’enfance ne doit pas être considéré comme un coût pesant sur les finances d’un pays, mais comme un investissement générant un rendement élevé par sa contribution à la croissance inclusive du pays. Assurer un revenu suffisant et un accès effectif aux services aux enfants déprivés et à leurs familles n’est pas seulement une obligation au regard des droits humains, mais aussi une question de bon sens économique (De Schutter, Frazer, Guio et Marlier, 2023.) ».
Pour ces différentes raisons, le Délégué général aux droits de l’enfant recommande au gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles de poursuivre l’extension de la gratuité des fournitures scolaires jusqu’à la fin du cursus primaire car celles-ci sont fondamentales pour que chaque enfant puisse pleinement acquérir les apprentissages de l’école. Par ailleurs, conformément aux intentions du Pacte pour un Enseignement d’excellence, il est important d’approfondir la question liée au plafonnement des voyages scolaires afin de les rendre le plus accessibles à tous les enfants. Enfin, la gratuité des cantines scolaires est également un enjeu fondamental en termes d’égalité des chances car elle a un impact indéniable sur la santé, le bien-être et la réussite scolaire des enfants.
La gratuité scolaire ne relève pas de considérations politiques ou philosophiques mais bien des droits fondamentaux de tous les élèves de la Fédération Wallonie-Bruxelles. En ce sens, elle devrait rassembler toutes les décideuses et tous les décideurs sur le principe de l’intérêt supérieur de nos enfants dans la foulée de l’article 3 de la Convention Internationale relative aux droits de l’enfant.