– Défenseur des droits de la république française–
Alors que 12 millions d’élèves du primaire et du secondaire font leur rentrée scolaire cette semaine, de trop nombreux enfants resteront chez eux faute de pouvoir être scolarisés, ou rencontreront de réelles difficultés dans leur apprentissage faute d’aménagements adéquats. Lycéens sans affectation, manque d’accessibilité et d’inclusivité pour les élèves en situation de handicap : ce sont des dizaines de milliers d’enfants qui, chaque année, voient leur droit à l’éducation entravé. Le Défenseur des droits est particulièrement vigilant à ces situations et fait de l’accès à l’éducation de tous les enfants une de ses priorités.
L’éducation, un droit fondamental consacré par la CIDE et la Constitution
Ratifiée en 1990 par la France, la Convention Internationale des Droits de l’Enfant (CIDE) reconnaît et consacre les droits fondamentaux de l’enfant. Parmi ces droits, figure le droit à l’éducation. L’article 28 de la Convention engage les États signataires à rendre l’enseignement primaire obligatoire et gratuit pour tous, à organiser des formes d’enseignement secondaire ouvertes et accessibles à tout enfant et à assurer l’accès à l’enseignement supérieur à tous. Par ailleurs l’article 13 de la Constitution française garantit « l’égal accès de l’enfant et de l’adulte à l’instruction, à la formation professionnelle et à la culture » et que « l’organisation de l’enseignement public gratuit et laïque à tous les degrés est un devoir de l’État ».
En France, le Défenseur des droits est l’organisation qui veille au respect de ces droits et de l’intérêt supérieur de l’enfant. L’accès à l’éducation pour tous les enfants est une priorité de l’institution et chaque rentrée scolaire est une occasion de constater les difficultés persistantes que rencontrent de nombreux enfants dans l’accès à l’école.
« Aujourd’hui, le service public n’est pas à la hauteur de l’engagement garanti par les textes de loi », Claire Hédon, Défenseure des droits.
Le Défenseur des droits rappelle qu’il est urgent d’agir. Décrochage scolaire, problèmes de santé, dépression, isolement social, … Les entraves dans l’accès à l’éducation ne sont pas anodines et ont des répercussions très concrètes sur l’année scolaire d’un enfant. Ce sont pourtant, chaque année, plusieurs dizaines de milliers d’enfants qui ne peuvent pas faire leur rentrée scolaire, ou qui rencontrent de réelles difficultés dans leur apprentissage faute d’aménagements adéquats.
Lycéens sans lycée, une nouvelle rentrée sans affectations
En 2022, la Défenseure des droits, Claire Hédon, s’est saisie d’office de la situation de nombreux élèves qui ont fait face à d’importantes difficultés pour poursuivre leur scolarité au lycée, faute de place pour les accueillir. Il s’agit de collégiens rencontrant des difficultés pour s’inscrire en classe de seconde, en particulier dans la voie professionnelle. D’élèves de seconde qui ont reçu une affectation tardive en classe de première, voire aucune affectation. Ou encore des élèves en classe de terminale ayant échoué à l’examen du baccalauréat (Bac) et qui ont rencontré des difficultés pour redoubler dans leur lycée d’origine.
L’enquête menée par le Défenseur des droits a par exemple révélé que 19 000 élèves de 3ème étaient en attente d’affectation dans la voie professionnelle à la rentrée 2023. Un an plus tard, les chiffres du Ministère de l’Éducation nationale et de la Jeunesse font état de 14 000 élèves non affectés du 26 juillet. C’est un progrès, mais ce chiffre témoigne une fois de plus de la rupture d’égalité dans l’accès à l’éducation.
Et si plusieurs recommandations formulées par le Défenseur des droits les années précédentes ont été suivies par le ministère comme :
- des tours d’affectation supplémentaires rapprochés au mois de juillet ;
- la mise en place d’une permanence téléphonique ou de cellules d’accueil dans les services départementaux ou rectoraux tout l’été pour répondre aux familles ;
- Ou encore l’inscription systématique pour les élèves sans solution à la rentrée scolaire dans leur établissement d’origine.
Le dernier tour d’affectation Affelnet, la procédure qui permet d’affecter les élèves de 3ème dans les lycées de leur Académie, n’aura lieu que le 8 septembre. Ce qui est trop tardif au regard du stress et des difficultés générées pour les élèves et leurs familles.
Élèves en situation de handicap, un manque d’inclusivité encore trop important
La France comptait 436 000 enfants handicapés scolarisés en 2022. Malgré une progression de l’accès à la scolarisation de ces enfants et quelques avancées notables, le Défenseur des droits constate que des difficultés considérables persistent. Manque d’infrastructures accessibles, absence de formation spécialisée des enseignants et des accompagnateurs, programmes scolaires, outils pédagogiques et salles de classes inadaptés… Nous sommes loin d’un environnement scolaire accessible et inclusif pour tous.
L’institution est toujours saisie de situations qui révèlent une vraie carence dans l’accès à l’école des élèves en situation de handicap. C’est le cas de la famille de Thibault qui a saisi le Défenseur des droits car aucun accompagnant d’élèves en situation de handicap (AESH) n’accompagnait leur fils sur le temps périscolaire et notamment la cantine ou encore de Kévin, enfant en fauteuil roulant et dont la non accessibilité de l’école de son village ne lui permettait pas de se rendre en cours.
En 2022, le Défenseur des droits avait publié un rapport sur l’accompagnement des élèves en situation de handicap, dans lequel l’institution avait émis plusieurs recommandations pour permettre d’instaurer une école réellement inclusive, accessible à tous, sans discrimination. Parmi ces recommandions on retrouvait le fait de favoriser l’implication de l’État dans le recrutement des accompagnants sur le temps périscolaire. De garantir des aménagements effectifs de la scolarité, adaptés aux besoins de chaque élève. Ou encore de mettre en place des temps de formation communs entre les enseignants et les professionnels du secteur médico-social.
2024 : une école loin d’être accessible et inclusive pour tous les enfants
Cette année encore, les élèves pâtissent du manque d’adaptation de l’institution scolaire et des contraintes de moyens et d’organisation. Cela va à l’encontre de la promesse d’égalité et d’adaptabilité du service public. Or c’est au service public de s’organiser en fonction des élèves et non l’inverse.