
– Défenseur des droits de l’Homme de la République d’Arménie –
La pratique consistant à restreindre illégalement le droit d’une personne à la libre circulation et à la maintenir dans un état d’incertitude constant reste problématique. Il s’agit en particulier des questions liées au système électronique d’information sur la gestion des frontières (BEMIS). L’un des principaux problèmes est que lorsqu’une personne ne sait pas ou n’est pas informée qu’elle est interdite de franchir les frontières, cette interdiction demeure même plusieurs années plus tard. C’est ainsi que, une fois à la frontière, des citoyens se sont vus informer qu’ils étaient interdits de voyage depuis plusieurs années.
Les plaintes adressées au Défenseur des droits au fil des ans servent de preuve que cette pratique ne s’est pas améliorée. Ce n’est qu’en 2020, en raison des dispositions militaires et d’urgence, que le nombre de plaintes a été différent. Après la suppression des restrictions au franchissement de la frontière de l’État, des plaintes parallèles continuent d’être adressées.
Il est particulièrement inquiétant qu’en présence des restrictions mentionnées, non seulement en raison des activités du Défenseur des droits de l’homme, mais les organes qui enquêtent sur l’affaire pénale ont eux-mêmes enregistré des problèmes liés à la restriction du droit du suspect ou de l’accusé à la libre circulation.
Selon l’article 144 du Code de procédure pénale de la République d’Arménie, le suspect ou l’accusé qui a signé une déclaration de ne pas quitter le pays ne peut pas se rendre dans un autre endroit ou changer de lieu de résidence sans l’autorisation de l’organe d’enquête, de l’enquêteur, du procureur ou du tribunal : il est ainsi obligé de se présenter à l’appel de l’organisme d’enquête, de l’enquêteur, du procureur ou du tribunal, pour les informer du changement de son lieu de résidence.
En particulier, les données relatives à l’application de la mesure de précaution « Signature de non sortie » par les autorités de poursuite sont saisies dans le BEMIS. Ce système a pour mission d’établir un système d’information unifié pour l’enregistrement des véhicules entrant et sortant de la République d’Arménie par les ministères concernés et d’autres organes de l’administration publique, afin d’assurer la réception, le recensement et le traitement des informations, ainsi que de fournir les données nécessaires aux organes concernés.
Comme en 2017, 2018, 2019, donc en 2020, dans les cas considérés par le Défenseur des droits de l’Homme, la restriction du droit de la personne à quitter le pays n’a pas été supprimée du système BEMIS, sur la base de l’interdiction appliquée pendant l’enquête préliminaire ; bien que cette dernière ait purgé la peine imposée par le tribunal….
Prenant en considération la continuité des plaintes soumises au Défenseur ainsi que le caractère systémique du problème, le Défenseur des droits de l’homme a fait une étude approfondie de la base constitutionnelle et des principes juridiques internationaux pour assurer le droit à la libre circulation d’une personne, de l’expérience législative des pays étrangers ainsi que de la précision et de la prévisibilité des règlements législatifs nationaux.
Par conséquent, le Défenseur a présenté le problème du point de vue de la législation et de la constitutionnalité de l’application de la loi, en exerçant la fonction de s’adresser à la Cour constitutionnelle d’Arménie.
La Cour constitutionnelle d’Arménie, par sa décision rendue le 4 avril 2017, a exprimé les conditions prédéterminant la légalité de la pratique d’application de la loi, en notant que » En présence d’une telle réglementation et en cas de restriction de la liberté de mouvement d’une personne par de tels mécanismes, elle devrait être réalisée à la seule condition que l’information sur la décision d’éliminer les mesures de précaution soit également placée dans le même système, et que les obstacles soient éliminés en ce qui concerne l’exercice d’un devoir clair de l’autorité compétente et le droit de libre circulation d’une personne », en enregistrant en même temps l’absence de cette exigence dans la législation, sous la forme d’une obligation claire imposée à l’organe qui mène la procédure.
En outre, suite à l’examen du contenu des plaintes adressées au Défenseur des droits de l’homme, la Cour constitutionnelle est arrivée à la conclusion que l’absence d’une obligation directe d’envoyer des informations au BEMIS pour lever la mesure conservatoire dans la décision faisant l’objet de l’enquête du Gouvernement de l’Arménie, remet en question la certitude de cette procédure, car il n’existe pas une telle obligation imposée à une autorité compétente spécifique.
Jusqu’à ce que des changements législatifs appropriés soient initiés, le Défenseur des droits de l’Homme note que la pratique des forces de l’ordre devrait se fonder sur le principe selon lequel, en plus de l’obligation de fournir des informations aux autorités compétentes utilisant des mesures de précaution, elles devraient également avoir l’obligation de fournir des informations sur la suppression de la mesure de précaution.
Traduction non officielle. Lien vers l’article original