– Défenseur des droits (France) –
Le Défenseur des droits a adressé ce jour une lettre aux Présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat ainsi qu’aux deux Présidents des commissions des lois dans laquelle, s’il rappelle que des contraintes légitimes et proportionnées restent justifiées dans le contexte actuel, il lui est néanmoins apparu nécessaire d’attirer l’attention et la vigilance de la représentation nationale sur certains points afin de minimiser les atteintes aux droits et les restrictions des libertés qui pourraient en résulter.
Compte tenu de l’expérience désormais acquise dans le cadre des régimes d’exception, le Défenseur des droits a ainsi rappelé l’impératif de limiter dans le temps les dispositions spéciales qui restreignent l’exercice des libertés publiques.
Pour le Défenseur des droits garantir la sécurité sanitaire du plus grand nombre ne doit pas conduire à insérer de façon durable des mesures exceptionnelles dans le droit commun à l’issue du déconfinement.
Il est à cet égard particulièrement préoccupé par les articles 2 à 5 du projet de loi qui ne sont pas rédigés comme des dérogations mais semblent amender sans durée limitée les dispositions du code de la santé publique, et ce par le biais d’une procédure législative d’exception.
Tout en approuvant le renoncement à l’obligation de mise en quarantaine des personnes contaminées, au profit d’un dispositif reposant sur leur responsabilité, le Défenseur des droits note que le maintien dans le texte de cette obligation « pour les personnes entrant sur le territoire national ou arrivant dans un territoire d’outre-mer » constitue une importante atteinte à la liberté d’aller et venir. Il estime donc nécessaire d’introduire le contrôle systématique du JLD dans les 48 heures de la mise en quarantaine, totale ou partielle. A tout le moins, il devrait automatiquement être saisi pour toute prolongation.
D’autre part, si le projet de loi autorise l’extension des catégories de personnes habilitées à constater les violations des restrictions à des agents de toute nature, dont certains ne sont pas assermentés, le Défenseur des droits rappelle que ce dispositif exige de mentionner les garanties qui entoureront les modalités de mise en œuvre de ces contrôles et leur conséquence.
Enfin, s’agissant de la possibilité de créer un système d’information « aux seules fins de lutter contre la propagation de l’épidémie de Covid-19 », pour la durée de l’épidémie ou, au plus tard, pour une durée d’un an à compter de la publication de la loi, le Défenseur des droits rappelle qu’il est indispensable que soient prévues des mesures juridiques adaptées à la sensibilité particulière des données de santé qui seront contenues dans ce qui deviendrait un véritable fichier de malades. Il tient à rappeler fermement que le gouvernement doit démontrer la nécessité, la proportionnalité et l’efficacité, de ce traitement de données couvertes par le secret médical et préconise son inscription dans la loi.
Il note que la notion de recueil « volontaire » des données ne figure pas dans le projet de loi. Il apparait néanmoins qu’il est essentiel que la loi fasse appel à la compréhension et au consentement éclairé, pour toutes et pour tous.
Si la crise sanitaire demande à ce que des mesures soient prises pour protéger la vie de toutes et tous et enrayer rapidement cette épidémie, il est particulièrement nécessaire de veiller à ce que ces dispositifs soient temporaires, strictement encadrés et qu’ils comportent des garanties renforcées permettant de préserver les libertés de chacune et chacun.